Le docteur Schwartz est riche en seringues, il en a pour tous les goûts et pour tous les corps. Il parcourt les quartiers verts et les quartiers bleus de la capitale, et malgré les barbelés et les vigiles, il va partout où il veut. Il reçoit les saluts de la milice, et le signe de croix des gens pieux, au hasard de sa flambante voiture triangulaire. Il joue des hormones comme d’un harmonium, il tire des substances des réservoirs de la Ligue, il passe pour avoir sauvé la vie de l’Héritière. Il a pourtant commencé sa carrière par un procès et il a récolté une amende à vie : mais depuis longtemps, il ne la paie plus.
Quand il était jeune il portait sur les jeunes corps en léthargie des mains professionnelles mais à présent qu’il n’a plus l’âge on suppose qu’il a réformé ses mœurs. Il a aidé tant de malades. Personne ne veut savoir qu’il s’arrête à tout bout de champ dans une rue déserte ou entre deux étages, qu’il fait saillir son gros ventre géologique et se pique au Priaptor. Ainsi s’expliquent ses délires incessants, sa joie infatigable, son dévouement pour les jeunes filles, le succès de ses thérapies à l’aveugle et les trois portes de résine du sanatorium sur lequel il règne comme sur une colonie lunaire.