La ruine du monde a fait sortir l’or de ses alvéoles. Il est vivant, il danse dans les cercles intérieurs, et les grands serviteurs du soleil, la tête encapuchonnée, les vêtements desserrés et coulants, battent des mains pour lui garder le rythme. Ils sont au comble de la joie, ils hurlent en musique, ils croquent des glaces en diamant.
À présent, chaque fois que je rencontre une jeune réfugiée et qu’elle parle, j’apprends de nouvelles choses sur le prix du passage. Ça ne se passe plus jamais dans une chambre ou dans un camion, mais dans une cave. Il y règne une lumière violente. Il ne s’agit plus de faire jouir mais de souffrir pour souffrir. Il y a des collectionneurs de souffrance et des dandys du rasoir.
Le couvre-feu cuit doucement dans la nuit. On mord à tâtons les viandes, on prend une douche froide et noire. Les jeux ont une teinture de cuivre et de silence : portraits, charades, chat perché, loup-garou, tandis qu’au dehors éclate la trompe des cris et des chiens. Les enfants tombent et dorment dans mes bras. Je les porte l’un après l’autre dans les vestiaires, ma femme revisse les sagaies.