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Laïos

Domaine(s) :
Genre(s) :
ISBN : 2-906131-88-1
Format : 16 x 24 cm
Pagination : 96 pages
Prix : 13€
Parution : novembre 2004

On connaît bien le destin d’Œdipe qui tue son père et épouse sa mère avant de se crever les yeux. Étrangement, le roi Laïos est souvent oublié. Pourtant la malédiction de sa lignée serait due au viol d’un enfant.

Vincent Magos évoque les événements qui précèdent la tragédie de Sophocle. On assiste à la trahison de Laïos, sa prise de pouvoir à Thèbes, son emprise sur Jocaste, sa confrontation avec Œdipe. Et la sphinge de rôder alentour… Éternellement.

Convoquer le mythe est, on l’aura compris, une manière de parler de l’actualité, de l’exercice du pouvoir dans tous ses abus, de l’homme remplaçable, jetable… Au delà de la pédophilie, la perversion, quand elle est à l’œuvre, corrompt aussi bien la sphère intime des relations d’amour et d’amitié que les sphères publiques, politiques…

Si la plupart des pièces de Sophocle sont perdues, on y trouve néanmoins une référence dans le manuscrit d’Œdipe Roi :

Ô Labdacide Laïos, tu veux une heureuse race ?
Je te donnerais donc un fils. Mais le sort te condamne
à quitter la lumière du jour par sa main. Le Cronide
Zeus l’a voulu, écoutant Pélops aux menaces haineuses
dont tu as violé le fils : car telle est sa prière.

Partant de ce fragment du texte de Sophocle, Vincent Magos propose une lecture de la destinée d’Œdipe, liée à la faute de Laïos. La malédiction n’est bien sûr pas liée à l’homosexualité (courante et codifiée dans la Grèce antique) mais, comme Georges Devereux l’a montré, à la rupture des règles sociales et à l’usage de la violence.

Ce n’est certes pas pur hasard qu’un belge s’empare de la figure de Laïos. Cependant tout l’intérêt du texte est de dépasser le thème de la pédophilie pour montrer comment la perversion, quand elle se déploie, corrompt aussi bien la sphère intime des relations d’amour et d’amitié que la sphère publique et politique. Sans doute est-ce cela qui a poussé le romancier sur scène : le théâtre n’est-il pas le lieu privilégié pour faire ressentir toute l’horreur de la perversion de la langue ?

Inévitablement, on se demande aussi comment Vincent Magos, psychanalyste, travaille à l’ombre du dramaturge. À ce propos, il reste discret : « Freud a fait d’Œdipe la figure emblématique de la névrose. Peut-être Œdipe doit-il ce destin, somme toute des plus communs, à la “normalité” de ses parents adoptifs, les souverains de Corinthe. Par contre, l’éclairage de la perversion est une manière d’envisager Laïos et le couple qu’il forme avec Jocaste. Mais ceci a peu d’intérêt, il s’agit de théâtre et non d’une thèse. Je m’intéresse davantage à ce qui m’échappe et résonne avec le monde contemporain qu’à l’étayage d’arguments théoriques. » De fait, l’érudition s’efface et la pièce, qui se déroule dans un temps incertain entre antiquité et modernité, est traversée, comme l’actualité, par la violence d’un langage d’emprise, des dialogues acérés, avec pour arrière-plan, la fureur des médias et le tir des kalachnikovs.

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